Le contrôle n’est pas le problème

par | Juin 17, 2025 | 0 commentaires

Le cycle contrôle – perte de contrôle

L’alimentation intuitive – une approche alternative aux régimes classiques – considère que contrôler notre alimentation est en soi un problème et que ce contrôle est à l’origine des troubles du comportement alimentaire. Notre corps sait intuitivement ce dont il a besoin, ainsi lui imposer des règles, utiliser la force de notre mental pour contrôler nos apports alimentaires est un problème et ne peut s’inscrire dans la durée. Quand on a épuisé notre stock de volonté, on craque, notre corps reprend ses droits et on ne parvient plus à contrôler.

C’est vrai, c’est précisément ce qu’il se passe et vous l’avez peut-être expérimenté vous-même : pleine de motivation, vous décidez de vous “remettre au régime”. Cette fois, c’est la bonne : votre volonté et votre tendance perfectionniste s’unissent pour vous faire appliquer à la lettre le nouveau protocole, régime, rééquilibrage alimentaire. La lune de miel dure quelques jours, quelques semaines ou quelques mois… Arrive le moment où la vie se complique un peu ou au contraire devient plus festive : les écarts se multiplient et les effets finissent par se voir sur la balance. Vous vous jugez d’avoir – encore une fois – tout gâché, vous pensez que VOUS êtes le problème et que vous êtes incapable de tenir vos engagements dans la durée. Vous passez alors de la phase “au régime” à la phase “pas au régime” : bienvenue dans l’effet yoyo. Quand on multiplie les périodes de restrictions au cours d’une vie, la durée du cycle finit par se raccourcir. Tout se déroule alors sur une semaine ou même une journée : on mange “parfait” toute la semaine et le week-end on vrille en se promettant que lundi on reprendra tout à 0 comme il faut.

L'alimentation intuitive accuse le contrôle alimentaire de provoquer des compulsions, la réalité c'est qu'on peut contrôler son alimentation sans activer notre cerveau émotionnel

Ce cycle est douloureusement banal. Ce n’est ni vous, ni moi, ni notre volonté le problème. Et je crois qu’on ne peut que insister sur ce point déculpabilisant. Appliquer un régime alimentaire créé par quelqu’un d’autre et manger avec sa tête comme si corps et émotions ne comptaient pas : en effet, ça ne marche pas dans la durée. Cela créé même une grande détresse intérieure. Quand l’alimentation intuitive soutient que supprimer le contrôle, les règles et injonctions diététiques nous permet de revenir naturellement à notre poids d’équilibre, je ne suis pas d’accord. Je pense et j’expérimente dans mon travail qu’évidemment nous pouvons amener du contrôle dans notre alimentation. Je pense même que pour notre santé physique et mentale et la qualité de notre environnement nous devons amener du contrôle. L’industrie agro-alimentaire base sa croissance – avec beaucoup de confiance – sur le fait que nous allons manger chaque année plus que l’année précédente. Lobbys et équipes marketing déploient toujours plus d’énergie pour rendre la nourriture attrayante, accessible, irrésistible et légitime. Nos appétits ne se régulent naturellement que lorsqu’ils s’exercent dans un environnement naturel. Où que vous habitiez en France, vous ne vivez pas dans un environnement “naturel” qui permettrait une régulation intuitive de vos sensations de faim et de rassasiement.

Le secret d’un contrôle bienfaisant

Il y a 10 ans, j’ai vécu une expérience qui illustre parfaitement cette idée de contrôle sous contrôle : Quand je suis devenue maman pour la deuxième fois, j’ai arrêté de consommer des produits laitiers que mon bébé ne supportait pas. Je l’allaitais et les protéines de lait (de vache) passaient à travers mon lait (d’humaine) et entraînaient problèmes digestifs, maux de ventre et reflux chez mon bébé qui n’était déjà pas un pro du sommeil.

J’avais à mon actif une grande expérience en restrictions alimentaires, régimes et autres expérimentations diététiques en tous genres. Se passer de produits laitiers, c’est se passer de beaucoup d’aliments (encore plus il y a 10 ans) : fromages, gâteaux, viennoiseries et tout ce qui est préparé à base de lait ou de crème.

Pourtant, cette éviction et le contrôle dont je faisais preuve sur mon alimentation étaient une expérience totalement différente de ce que j’avais connu jusqu’ici : pour la première fois, je tenais un “régime”, je contrôlais mon alimentation, sans avoir envie de me faire des orgies de fromages quand, de temps en temps je m’accordais une petite incartade.

Je me suis moi-même surprise et je m’interrogeais : mais pourquoi est-ce si différent de tous les “régimes” que j’ai fait jusqu’ici ? Je sentais qu’il y avait quelque chose qui se jouait à l’intérieur de moi, comme si j’avais trouvé une clé redoutablement efficace pour m’autoriser la restriction alimentaire sans basculer dans le mode hors-de-contrôle comme chaque régime me l’avait fait faire jusqu’ici.

J’avais le sentiment d’avoir comme “hacké” mon fonctionnement mais sans arriver à dire ce qui précisément était différent. C’était très frustrant, car j’aurais bien aimé appliquer ce mode de fonctionnement à toute ma relation à l’alimentation, mais impossible d’identifier les différents ingrédients de cette recette qui restait mystérieuse.

Ce n’est que bien des années plus tard que j’ai décodé et expliqué mon attitude et ma capacité à suivre avec facilité et dans la durée des règles alimentaires sans qu’un petit écart ne se transforme en ripailles.

Ce qui était fondamentalement différent, c’était l’intention qui guidait ma démarche : pour la première fois de ma vie, j’avais décidé de contrôler mon alimentation, non pas parce que je détestais mon corps en l’état, mais parce que j’aimais mon bébé d’un amour inconditionnel. Et cette énergie, cette intention d’amour elle change TOUT dans notre expérience, y compris dans notre expérience de contrôle ou de limitation.

Notre vie entière n’est-elle pas faite d’éléments que l’on contrôle sans que l’on ait besoin de soupapes de décompression en mode hors-de-contrôle-foutu-pour-foutu-on-verra-lundi ?

  • Je respecte (la plupart du temps) le code de la route, je contrôle mes arrêts aux feux rouges et quand par mégarde ou empressement je décide de griller un stop, je ne me juge pas de l’avoir fait et je ne me dis pas : ”au point où j’en suis, et puisque j’ai fauté, je vais me faire tous les feux jusqu’à ce que j’arrive à la maison”.
  • Je limite les temps d’écran de mes enfants et quand ça déborde parce que j’étais occupée ailleurs, je ne leur dis pas : “Ben voilà, je savais bien que j’étais pas capable de respecter le timing, puisque c’est comme ça, vous n’avez qu’à y passer tout le week-end, on reprendra le compteur à partir de la semaine prochaine”.
  • Si je suis fatiguée et que j’ai du mal à me lever le matin, alors je peux décider de mieux contrôler mon temps de sommeil et m’imposer une règle sans écran à partir de 21H et dans mon lit à 22h30. Je ne vais pas abandonner ma nouvelle habitude sous prétexte que j’ai craqué un soir devant Netflix.

autosabotage et perte de contrôle ne sont pas une fatalité quand on essaie de perdre du poids

L’autosabotage et la perte de contrôle n’interviennent qu’à partir du moment où l’on décide d’une règle à suivre avec une énergie de culpabilité, de peur, de haine de soi, de honte. Dès lors que le contrôle carbure à l’amour, les écarts ne sont pas sujets à jugements ni à pertes de contrôle, on est capable d’interagir avec les règles que l’on se donne avec souplesse et flexibilité, on sort de la dichotomie qui nous invite à considérer que notre propre valeur dépend de notre poids ou de notre capacité à respecter la règle à la lettre et que le moindre écart mérite une punition.

Voilà la clé de compréhension qui me manquait quand je disais “non merci” au fromage qui me faisait pourtant envie ou “je vais en prendre un petit bout, juste pour goûter” sans que cela ne m’empêche de poursuivre mon “régime”. Malgré moi et pour la première fois de ma vie, c’était l’amour qui dictait ma démarche de contrôler mon alimentation. Il n’était pas question de me rendre conforme, l’enjeu n’était pas de parvenir à m’aimer, m’accepter ou me trouver montrable au bout du régime. L’enjeu était juste de prendre soin d’un être humain.

Avec de l’amour, du respect, de la compassion et l’envie de prendre soin, on ne bascule pas.

Avec de la haine, de la culpabilité, du jugement, on bascule systématiquement dans le large spectre dans lequel s’inscrivent les “troubles du comportement alimentaire”. C’est le point commun entre anorexie, boulimie nerveuse et hyperphagie boulimique : le défaut d’acceptation corporelle, la honte, l’intégration de l’idée qu’un corps “gros” n’est pas conforme et qu’il faut le rendre conforme à coup de régimes.

Quand on met en place des règles alimentaires dans un souci de soin et d’amour de soi et en connectant notre alimentation à nos valeurs profondes, il ne peut y avoir ni anorexie, ni boulimie. Un corps respecté, c’est un corps avec lequel on connecte, c’est un corps qu’on écoute, qu’on entend et un corps dont on respecte à la fois les besoins mais aussi les limites.

L’antidote à l’échec de toute entreprise de perte de poids, c’est une démarche d’amour de soi. C’est l’antidote à :

  • l’auto-sabotage,
  • au découragement,
  • au foutu-pour-foutu.

C’est aussi le sésame pour s’accompagner :

  • dans nos faims émotionnelles,
  • dans notre capacité à nous affirmer et à dire non au gâteau que votre collègue vous a si gentiment proposé alors que vous n’aviez plus faim,
  • dans notre capacité à observer que nous n’avons pas faim et que ce soir, le repas familial se fera avec un couvert en moins sur la table.

Parce que je respecte mon corps, entre l’inconfort d’une frustration et l’inconfort digestif et émotionnel qui suit une over-alimentation, je choisis aujourd’hui la première option avec légèreté parce qu’alignée avec ma volonté d’amour pour moi.

S’aimer, ce n’est pas trouver son corps beau

Si vous luttez avec votre image et la nourriture depuis des années voire des décennies, je vous entends déjà : je sais que votre mental et votre corps s’unissent pour poser un grand véto à la perspective de vous aimer “en l’état”. J’aimerais vous rassurer : heureusement, pas besoin de se trouver canon dans le miroir pour apprendre à s’aimer. On peut – évidemment – aimer notre corps sans le trouver beau, comme vous aimez sans doute des gens autour de vous profondément sans trouver nécessairement leur corps particulièrement beau.

Le processus qui consiste à s’aimer, à aimer et chérir notre corps en s’affranchissant de la nécessité de le trouver suffisamment beau ou mince est en revanche le seul moyen d’apprendre à prendre soin de vous dans la durée. Et c’est la seule voie qui permet de perdre du poids tout en soignant et préservant notre relation à notre alimentation. Et c’est ce qu’on veut pour nous, n’est-ce pas ? Vivre dans un corps plus léger et se sentir libre de manger ?

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Ce n'est pas contrôler son alimentation qui pose problème, c'est l'intention qui motive ce contrôle : une intention de culpabilité et de haine ou une intention d'amour

Written By Marilyn Comte

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